Cette chanson, Verbo Carne, me rappelle un des meilleurs moments de ma vie. Pas lié à des circonstances exceptionnelles, mais à un état, momentané, de plénitude que j’ai rarement ressenti : à l’ombre alors qu’il faisait chaud, buvant une délicieuse tisane glacée alors que j’avais soif, à l’abri d’une cour intérieure alors que je revenais d’une excursion chaotique dans les grands espaces de la Valle de la Luna.
Ce n’est pas souvent que je te raconte ma vie sur Playpause, mais là, je suis obligé de te dire pourquoi j’aime la musique de Gustavo Cerati, alors que je crains pour son intégrité artistique à quelques semaines de la sortie de Fijación oral, le nouvel album de Shakira auquel l’ex-leader de Soda Stereo a collaboré. D’ailleurs, je n’ai rien contre Shakira, elle est toute gentille. Et après s’être langoureusement roulée dans la boue pour le clip de Whenever Wherever, elle a la délicatesse de se tartiner de cambouis dans le clip de La Tortura, qui porte, malgré tout ce que je viens d’écrire, bien son nom.
Tout ça pour te dire que le tsunami latino n’a pas de frontières : fatiguée d’avoir à représenter toute seule le star system hispanisant à l’échelle mondiale, la colombienne qui a percé aux Etats-Unis grâce au soutien du clan Estefan (des cubains) s’offre les bons services d’un argentin et d’un espagnol (le pénible Alejandro Sanz). Tout ça pour enregistrer, j’en parlais, La Tortura, tube de l’été à mi-chemin entre la bachata (musique dominicaine) d’Aventura (groupe américain constitué entre New York et Boston) et le reggaeton (musique panaméenne et portoricaine) de N.O.R.E. (alias Noreaga).
Un peu comme si Jenifer, Patricia Kaas, ou pire, Ginette Reno, était chargée à elle toute seule d’incarner la chanson francophone dans le monde entier, et qu’on lui collait Alain Bashung dans les pattes pour lui écrire de vraies belles mélodies et des hits de r’n’b.
Un peu comme Gabrielle Solis, le personnage « ethnique » de Desperate Housewives, qui est tout à la fois l’american dream accompli et bousculé, la post-modernité banlieusarde et le poids des traditions. Autant te dire un peu trop pour une petite bonne femme rigolote. Et c’est là que l’argument prétendument féministe de ce spectacle télévisé est pris en défaut : enceinte alors qu’elle n’en a absolument pas envie, l’avortement n’est même pas une option pour elle, ni pour les scénaristes d’ABC. Mais bon, là, ce n’est pas ma vie que je raconte, c’est ta série préférée de l’année prochaine que je spoile allègrement. Désolé, il fallait que je l’écrive.
Took some time away that felt like vacation… Made some changes, though, to Playpause‘s back office and some links may be broken now. Sorry again for irregular posting and inconvenience.
While I was checking info about Shakira for the previous post, I read that her upcoming album features duets with Gustavo Cerati. I don’t know much about this Argentinian musician, former Soda Stereo bandleader, except that he seems to be quite influent in Latin America and that he remains unknown in the rest of the world despite his producing talents and writing skills. Unlike Alejandro Sanz, pain in the ass who pairs with Shakira on the single La Tortura.
In this case, I always wonder who takes advantage the most: the superstar who can boast of recording with a genuine rocker, or the rocker who gains worldwide exposure? Credibility on one side, popularity on the other… Will Cerati trade his melodic twist for a Top ten hit in 87455 countries?
In 1999, he showed his musical visions on Bocanada, full of pre-electroclash, trip-hop and symphonic arrangements under the influence of Jorge Luis Borges. Great soundtrack of what I recall to be one of the coolest afternoons of my life. From this album, I picked up for you the haunting Verbo Carne: El diablo frecuenta soledades, nice way to sing for love…
(image taken from Shakiramedia.com Gallery)
Gustavo Cerati – Verbo Carne