Moodboard 2010-2019

🇫🇷 La plus 2019 des années 2010 : Rosalía

Je l’adore. Pas nouvelle cette année, pourtant, la musique et la présence de Rosalía incarnent le renouveau de 2019. Les lyrics en anglais sont dépassées dans la pop, it’s a fact.

Ce qui convient désormais, c’est du catalan comme dans Milionària, du coréen (je suis passé largement à côté du train K-pop) ou la novlangue d’Aya Nakamura. Je ne serais pas surpris que la série inspirée du Seigneur des anneaux, ou tout autre univers de fiction doté d’une langue construite, inventée, ne finisse par donner naissance à des hits. Finalement, un tube, c’est un mème musical : tout est bon à prendre à ce compte et la culture passée à la moulinette du web ouvre de nouvelles possibilités.

En tout cas, il est loin le temps des Beatles « Baby, you can drive my car / Yes, I’m gonna be a star ». Regardez comme Lady Gaga s’est archi-vite ringardisée avec ses onomatopées de nouveau-né WASP épileptique.

De Gangnam Style à Despacito, le Top 50 mondial n’a jamais été aussi polyglotte. Et ce, malgré Taylor Swift, qui est aussi un marqueur de la décennie (DAMN IT).

Chose étrange, cette internationalisation des référents musicaux n’a pas ouvert de nouveaux horizons politiques. On est allé directement du Printemps arabe au Brexit sans passer par la case We Are The World. Pas de protest song 2.0 : non, maintenant, la jeunesse fait des détournements de tutos sur Tik Tok. On retiendra toutefois que la valeureuse MIA s’est exprimée en chanson sur le thème des migrants, U2 aussi entre autres. (La candidature de la France à l’Eurovision, avec Mercy, c’était un gros WTF).  Et on a pu compter au final sur Madonna pour défendre les gays, les Juifs, l’Islam, les femmes violées et d’autres opprimés dans une seule et même chanson.

Même Joan Baez prend sa retraite, alors…

🇬🇧 Dead people

Prince. I remember so well when I learned his passing. Nice evening. I was riding back from work and my phone kept buzzing (I have since disabled most news notifications, the Tens were such a mess about that too), so I checked it at a red light, close to the Opera, and he was declared dead. It took me a few breaths to take it in. Went back to that moment, a couple of days before, when I learned that he’d had a stroke or something: I thought « Oh no, not you, not now ».
Then again, I thought « Oh no, not you, not now ».

Back home, I listened to his music, sipping wine.
Shit.

Think of it, even Lauren Bacall was still (but) alive at the beginning of the decade.
Gil Scott-Heron.
Sylvia Robinson, Etta James, Whitney Houston, Donna Summer.
Donald Byrd, Yusef Lateef.
Gustavo Cerati.
Bowie.
Then, it was George Michael.
Then, it was Jeanne Moreau 💔.
Then, it was Aretha.
And Michel Legrand.

Those years are gone.

🇫🇷 La dance molle et les chanteuses à voix de petite fille

Ça a commencé dès 2010, avec Nightcall de Kavinsky.

Puis, dans la lignée de James Blake (aussi une des révélations de la décennie), mais en plus accessible : Flume, Kygo, Fakear, Petit Biscuit… tous ces nouveaux venus qui se sont vite fait un nom et qui ont fini par tous se ressembler.

En parallèle, Robyn, Nicolas Jaar, Disclosure, Four Tet, Caribou, Metronomy, Maya Jane Coles, Tycho, The Avalanches, Neon Indian, Unknown Mortal Orchestra, Boards of Canada, Nicola Cruz, Pacific Coliseum [qui fait le lien avec la vaporwave, cf. plus bas], Mark Ronson, jusqu’à Helado Negro encore cette année, ont tous apporté leur touche plus ou moins indé / underground à cette vibe. Pour calmer tout le monde et pousser le bouchon, Burial sort une compile 2011-2019, qui résume un peu tout ça. Bref.

Sont venus les hits tendance hyper régressive, des productions pas violentes et enveloppantes, des intonations rassurantes et chuchotantes, des tubes-doudous qui donnent autant envie de twerker qu’une comptine (cf. Abra, plus bas).
Du guilleret Rather Be avec la voix mielleuse de Jess Glyne, à Goodbye de Feder et son gimmick à la mandoline, sans oublier l’immanquable Lean On de l’immanquable Major Lazer, on n’a jamais dansé aussi sagement.

Katy Perry a enterré le game. Déjà, le retour de Daft Punk avait été mou du genou, hein… Un des clous dans le cercueil de cette vogue aura été Feels par le combo Calvin Harris / Katy Perry (encore elle) / Pharrell et Big Sean, une soupe aux featurings réchauffés. Même Clairo s’est perdue, passant d’une pop super lo-fi, aux multiples influences, à un trip plus indus assez laid à l’oreille.

La dance est redevenue plus VNR (trop pour certains), comme récemment avec ce truc chelou et pêchu de Four Tet (ironie de l’histoire, le sample date de 2006), pendant que perdurent encore quelques clichés beauf et big room, hantés par le fantôme d’Avicii, avec du gros son pour festoche où un couillon fait semblant de tourner des boutons devant une foule de kids super high.

La nonchalance est restée, elle a muté : avec la transformation des beats hip hop et r’n’b en trap, la deuxième moitié des années 10 a ouvert la voie à une version urbaine de la dance molle, cette fois mumble-rappée par des gamins de 20 ans avec des couteaux ou des lettrages dégueu tatoués sur le visage.

Ou minaudée par Ariana Grande.

🇬🇧 Music on screen

Musical documentaries were quite a thing. It started with the excellent Searching for Sugarman which made me rediscover Sixto Rodriguez, then there was Twenty Feet from Stardom (that Gimme Shelter moment is unforgettable), and then Netflix arrived with What Happened, Miss Simone?, Quincy and Homecoming.

In 2019, I litterally wept non-stop through Aretha’s Amazing Grace. For 2 hours. I still get goosebumps when I think of it.

Among other musical emotions at the movies, I’ll remember Barbara by Mathieu Amalric, Only Lovers Left Alive by Jim Jarmusch, Inside Llewyn Davis by the Coen brothers, Modern Love in Frances Ha, Xavier Dolan’s Les Amours imaginaires, Tom à la ferme & Mommy soundtracks (still not my thing, Céline Dion sure won the 2010s too), the awesome Doof Warrior, half-guitarist, half-flamethrower, in Mad Max: Fury Road, the 9 minutes 49 seconds progression of Light of the Seven in GOT season 6 finale, Preciso me encontrar by Liniker in Netflix Brasil’s 3%Skyfall opening credits, Harry Nilsson’s Without Her at the end of Victoria (echoed by Harry Nilsson’s Gotta Get Up in Russian Doll), Le Temps de l’amour in Moonrise Kingdom‘s so cute dance scene (mirrored by the Settin’ The Woods on Fire by Hank Williams in The End of The F***ing World), the Italian canzone in Call Me By Your Name and Adam Driver torch singing Being Alive at the end of Marriage Story.

And despite all the hate, I really enjoyed Vinyl, the HBO series, especially the giganormous two hour long pilot directed by Martin Scorsese. I really wish there had been a season 2 in order to dig more into disco and fix what The Get Down missed too.
Inexplicably, both shows were somehow wrong about what disco sounded like in the beginning.

🇫🇷 Beyoncé

Impossible de résumer l’improbable OPA de Queen B sur les années 2010. Elles sont passées très vite, et sans doute il faudra du temps pour digérer ce qu’elle a apporté, dans le maelstrom qui nous a conduit d’Obama à Trump.

Du suave (et mésestimé par moi-même à l’époque) 4 au phénoménal Lemonade, sans oublier la séminale surprise de Beyoncé en 2013, elle s’est imposée comme la star indépassable de l’époque, par ses performances, la prise de contrôle de sa persona à un niveau jamais égalé, sa plastique, son féminisme empowered et finalement son omniprésence.
Cette vedette est ce que l’industrie musicale a fait de mieux pour se racheter d’avoir engendré Michael Jackson.

J’aurais pu choisir un de ses plus gros coups de cette période Drunk In Love, parce que ça me fait toujours penser à Björk et à Ella Fitzgerald en même temps. Le truc, c’est que l’en même temps, c’est devenu compliqué.

Donc, puisqu’il est question ici de Prince et de tous ces RIP, The Beautiful Ones me paraît fort à propos.
(la 2e partie du clip, en revanche, c’est selon…)

🇬🇧 Rihanna

One of the most iconic songs of these years, and a damn good one.

I mean, RiRI crossovered Britney Spears, Shakira, Calvin Harris, Paul McCartney, Drake, fashion and Instagram. And she brought Diamonds (another Top ’10 song) to pop like Greta Thunberg a voice to the planet, like blah blah blah.

(Hey, that’s meta: « iconic » is one the words that has emerged since 2011, check Google Trends.)

🇫🇷 Kanye West

Dérouleur de beats.
Poopy-di scoop.
Génie pour certains.
Scoop-diddy-whoop.
A dansé le Floss avec Jay-Z bien avant Fortnite.
Whoop-di-scoop-di-poop.
Troll bipolaire qui penche vraiment trop à droite.
Poop-di-scoopty.
Mari de Kim Kardashian. (Putain de souvenir des années 10, ça aussi !)
Whoopity-scoop, whoop-poop.
Infréquentable mais respecté.
Poop-diddy, whoop-scoop.

Poop, poop.

🇬🇧 Abra

Among all the fresh faces from the Twenty-Tens, Abra holds a special place. The unexpected childling of Janet Jackson, rougher than AlunaGeorge, less creepy than Billie Eilish, less dool-like than Kali Uchis, fierce, influent and still underground.
Featured on Solange’s and Toro Y Moi’s latest albums, two artists among my loveyou’s of the decennary.

🇫🇷 Gainsbourg


Outre ce nouvel inédit, Lola Rastaquouère écoutée tant de fois et encore redécouverte très récemment dans cette version étirée au possible (le passage à partir de 7’11 » 👍), ce qui me vient en premier, c’est We Love Green, où j’ai vu Charlotte pour la première fois en 2018, parce que cette pelouse, par un intime et intérieur colimaçon, représente aussi d’autres choses dans ma vie.
Sans rentrer dans les détails, la conclusion, c’est que la musique est restée un gilet de sauvetage extrêmement fiable pendant ces 3645 jours. Notamment celle de la famille Ginsburg, ça remonte aux premières imprégnations quand j’étais gamin, et en dépit des tentatives du cher Lulu.

Depuis Gainsbourg, vie héroïque en 2010, de la réédition augmentée de Melody Nelson, à l’excellent Rest, en passant par l’intime journal de Jane B. en 2019, la galaxie Gainsbarre m’aura plus régalé que le hachis parmentier des Skywalker. Real people are real.
(Bon, ok, j’avoue, Baby Yoda, je craque comme tout le monde.)

🇬🇧 Out my mind, just in time

How can anyone live without Erykah Badu? Her power, her voice, her poetry?
I saw her, again, two or three times in the ’10s.

Among others, the artists I saw the most are Janelle Monáe, Björk (putain, j’ai vu Björk au Fuji Rock Festival 2013), Beyoncé, Madonna (can’t forget the intensity of La Marseillaise sung by the whole Bercy arena, a few weeks after the Bataclan attacks), Prince…
and Midnight Magic, my favourite live act of the decade.

Life is a circle: this love-breakup-rebirth song has been a personal staple in f%ing ’10 and in f#ing ’19.

Don’t ask, just listen through it. Again and again.

🇫🇷 Frank Ocean

Ce mec mérite tous les likes (encore un symbole des années 2010-2019) du monde.
Vas-y Franky, t’es bon. Merci pour ta musique, et surtout pour Pyramids à 1’11.

🇬🇧 Vaporwave

Call it future funk, call it nu disco, call it seapunk, call it post-trip hop, call it the next step after DJ re-edits (this subgenre, which originated with reggae and disco, peaked between 2007 and 2012)… Whatever, it’s an all new continent of sonic rehashing and digital reworking, sometimes including Microsoft Windows easter eggs. The spoils of digital native and 80s/90s (soon 2000s) nostalgia subculture. Flourishing, exciting, unhinged, glitched, screwed and chopped. So much fun.

I’m still wondering what the 2010 kids will be covering or sampling in 15 years. Snapchat and Android notifications maybe?

🇫🇷 Du piratage au streaming

On a globalement arrêté d’acquérir de la musique. Sauf en vinyle ou en cassette, mais au fond, c’est avant tout « pour l’objet ».
Et, perso, de temps en temps sur bandcamp.

On ne la vole (allez, presque…) plus non plus, depuis la neutralisation spectaculaire de Kim Dotcom en 2012.

Petit à petit, on est tous devenus abonnés.

A Spotify quand on est dans le camp des gens cools, à Amazon quand on n’est pas regardant sur le marchand, à Apple Music quand on est snob, à Tidal quand on est ultra-snob, à Deezer quand pourquoi pas…
Ou alors utilisateur de Youtube quand on est trop jeune pour avoir une carte bleue, quand on veut accéder au plus grand catalogue (covers pourries, bootlegs et morceaux officiellement reniés par l’artiste inclus), quand on n’a pas envie de payer pour écouter un truc qui est gratuit ailleurs ou qu’on s’en fout de bouffer le même pré-roll plusieurs fois par jour pour écouter en boucle Bim Bam Boum.

Cette évolution est en train de rendre obsolète les concepts d’album et de single. La consommation numérique de la musique a aussi démodé les albums mixés, où les morceaux s’enchaînent, et les interludes au début ou à la fin des chansons.

Des enregistrements studio, il ne reste vraiment plus que des tracks à playlister.

🏳️‍🌈 My chouchou de la década : Álex Anwandter

Depuis que je suis né, c’est toujours vendredi dans mon coeur. Et un jour, j’ai découvert un artiste qui avait écrit une chanson exactement sur ça (le reste des paroles dit un peu autre chose, mais bon, c’est aussi le propre de la pop d’offrir une multitude d’interprétations dont celle qui complait à l’auditeur).

Mais pas que : de Santiago à New York ou Los Angeles, où il vit si je comprends bien, Álex Anwandter compte dans la musique latino-américaine, parce qu’il la secoue un peu en contournant les clichés tropicalistes (ya qu’à entendre ses reprises de Milton Nascimento et de Chico Buarque sur son dernier album, magnifiques et absolument pas solaires comme on aurait pu s’y attendre). Il a même été adoubé par le fils de Gustavo Cerati d’une certaine façon.
Et puis faut voir ses posts en ce moment (c’est totalement la merde au Chili*, fin 2019).
*comme partout dans le monde, aussi, non ? 😳

Beau gosse queer, tendance non-binaire, il offre aussi des cours de musique, il produit des petits jeunes… Sans minimiser, ni banaliser, ni trivilialiser sa démarche, le mec est vachement dans son époque.
Et moi aussi, un peu plus grâce à lui.

Un petit regret, je ne l’ai jamais vu en concert, sans doute pendant les meilleures années de sa carrière. Reste aussi à voir son film, Nunca vas a estar solo.

Bonus tracks

Parce que Peggy Lee.
Parce que Don Draper.
Parce que « If that’s all there is my friends, then let’s keep dancing ».

« Me deixem cantar até o fim » a enchéri ma vieille copine Elza Soares en 2015 sur l’excellent A Mulher do Fim do Mundo.

« Nothing could be harder than the quest for fun
« .
David Bowie –
Baal’s Hymn (1982)

(Cover image by Playpause on Instagram)

10 random thoughts about Beyoncé / 10 trucs au sujet de Beyoncé

Truc n°1. Personne ne peut reprendre les chansons de Beyoncé


Le premier candidat de téléréalité qui reprend Crazy In Love se fait sortir par les rouges du jury et les votes du public en moins de temps qu’il faut pour twerker. Peu d’artistes mainstream parviennent à incarner leur personnage musical de façon aussi aboutie, et sur la durée : il est extrêmement risqué de s’attaquer frontalement à du Céline Dion, du Madonna ou du Michael Jackson sans passer pour un baltringue. Si tu en doutes, mate ce duo Janelle Monáe / Kimbra : alors que la première assure la relève en envoyant du très très lourd, l’autre tire sur les cordes vocales comme une chanteuse de baloche. Cela dit, avec les bonnes chansons, il y a toujours matière à… The Weeknd s’en est sorti, en refroidissant Drunk In Love au point d’en faire une version complètement dépressive, loin de l’ode langoureuse que le morceau est à l’origine. Autre possibilité : faire des reprises sans musique ni choré, comme les Beyoncélogues de l’hilarante, mais pas que, Nina Millin.

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Où sont les fembots ?

Machos after all En choisissant d’intituler l’album Random Access Memories, les Daft affichent clairement leur concept : souvenirs-souvenirs, un peu de ceci, un peu de cela. Au petit bonheur la chance, suis-je tenté d’ajouter. Ils se sont fait plaisir, on ne peut pas le leur reprocher étant donné la clique classe qu’ils ont réussi à rassembler autour d’eux. (Cela dit, pas l’ombre d’une femme à l’horizon : la misogynie nerd et adolescente du duo de potos commence à se voir…)

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#libertédeconscience #mariagepourtous

mariagepourtous.gif

Monsieur le Président,

Je ne vous écris pas pour vous demander de tenir la promesse 31 de votre plateforme présidentielle. A 37 ans, j’ai vu suffisamment d’élus, à tous les niveaux, de la petite mairie de campagne au palais de l’Elysée, oublier leurs paroles de campagne au profit d’un réalisme bon teint et de la recherche du consensus, une fois au pouvoir. Je ne me fais guère d’illusions et, je n’espère pas que vous mettiez en œuvre plus d’une trentaine de vos soixante engagements.
Le mariage pour tous, toutefois, tient une place à part dans le programme que vous avez présenté aux Français : une loi symbolique ; un engagement clairement de gauche ; une avancée sociale comparable à l’abolition de la peine de mort ou, dans une thématique plus proche, à l’égalité de la majorité sexuelle établies en leur temps par Mitterrand ; la possibilité pour la France en tant que pays des droits de l’homme de rattraper son retard sur la question ; une proposition à la fois « dans l’air du temps » mais aussi en avance sur les traditions dont on se réclame à mon goût trop souvent ; une réforme qui ne coûte pas un sou ; enfin, la reconnaissance par l’Etat que je ne suis pas un citoyen de seconde zone sur le plan psychologique, social et familial, indigne de me marier ou d’élever des enfants.
C’est pourquoi, depuis votre élection, parmi toutes les mesures que vous et votre gouvernement présentez, je suis de près le processus de sa concrétisation et le débat qui a bel et bien lieu à ce sujet.
Je ne suis pas le seul à avoir noté une certaine hésitation, si ce n’est de la timidité, lorsque la présentation du projet de loi devant le parlement a été repoussée de quelques semaines. Cela m’a choqué, j’ai immédiatement déploré que cela ne servirait qu’à envenimer le discours des uns et à radicaliser les autres. Cela n’a effectivement pas manqué et les manifestations de ce week-end en sont la preuve.
Que les religieux les plus archaïques s’accrochent à leurs dogmes pour s’y opposer, grand bien leur fasse. Qu’ils m’insultent au passage, qu’ils fassent l’amalgame entre l’homosexualité et des pratiques aussi condamnables que l’inceste ou la zoophilie, pourquoi pas. Tant que les dépositaires de l’autorité publique condamnent de tels propos, je suis rassuré.
Mais aujourd’hui, lors de votre discours devant l’Association des maires de France, vous avez proposé qu’on délègue le mariage entre homosexuels à des adjoints. Au nom d’une liberté de conscience, inacceptable, si ce n’est inconstitutionnelle, pour un élu municipal.
La promesse de l’égalité de droits n’en est désormais plus une, vous érigez le préjugé en principe recevable de l’exercice du pouvoir.
Comment osez-vous tordre ainsi la devise française « Liberté, égalité, fraternité ? Avez-vous considéré les conséquences d’une telle déclaration au regard des autres minorités qui constituent la population française ? Au nom de quelle valeur considérez-vous qu’un maire peut avoir une conscience autre que celle de servir la République et de faire appliquer sa loi ?
J’enrage et je regrette déjà les deux bulletins de vote que j’ai glissés dans l’urne pour vous porter aux responsabilités. Au-delà de la défense d’une cause qui me tient à cœur, ce soir, j’ai honte d’être français, honte d’avoir cautionné par la voie démocratique votre propre déni de l’idéal républicain.
Les convenances voudraient que je vous prie de recevoir mes salutations distinguées, mais je ne peux que vous présenter, Monsieur le Président, l’expression de ma consternation et le sentiment de déshonneur que vous m’inspirez.

Hubert Kerjean

[EDIT] Bien que le président ait retiré ses propos, je laisse le billet en ligne. Ça pourra toujours servir.

(Voir aussi : François Hollande – Quels droits pour les LGBT ?
Homosexualités et Socialisme, le 29 septembre 2011
image : affichespourtous.fr)

Dealeuse de hit

Good girls don't misbehave but she's a bad girl anyway Tant de temps passé à écouter et à penser Madonna depuis mes années collège, pourtant je n’ai jamais consacré plus de quelques minutes à écrire à son propos (sauf ici, et ). Au fond, je n’ai jamais été à l’aise avec le fait d’être aussi fasciné par elle, sa musique et ses shows (infiniment moins par le reste de sa production artistique), compendium de la pop commerciale mondialiste, alors que je me revendique aussi comme un mélomane curieux et ouvert, pas vraiment enclin à la trivialité des faiseurs de tubes.

Tu parles.

C’est peut-être parce que son nouvel album s’appelle MDNA et que le moment est venu de parler de mon addiction à la Ciccocaïne.

C’est peut-être aussi parce que, pour une fois, presque rien de ce que j’ai lu ne correspond réellement à ce que j’en pense.

C’est peut-être enfin parce que chacun de ses albums a accompagné une tranche de ma vie et que j’ai envie de détailler la recette qu’elle me sert en 2012, celle que je vais avaler pendant les mois et les années à venir, jusqu’à l’écœurement.

Tout a déjà été écrit à propos de MDNA, entre manifeste de son règne sur la pop depuis 30 ans et tentative pathétique de come-back sur les terres labourées par Lady Gaga. Je ne pense pas que la question se pose de cette façon : Madonna, par sa carrière et le personnage public qu’elle a développé, n’a plus rien à prouver. Michael Jackson et Whitney Houston enterrés, elle est la seule superstar des années 80 encore en exercice qui parvient à la fois à susciter un intérêt médiatique et à déplacer les foules. Autre survivant et ancien collaborateur du temps de Like A Prayer, Prince est un peu à part, retranché dans une posture alternative (si le qualificatif est pertinent pour un artiste de sa carrure) qui intrigue plus qu’elle ne passionne. Mais c’est une autre histoire, j’y reviendrai peut-être un jour.

Cet album porte bien son nom. La dame répète à longueur d’interviews qu’il s’agit d’un “triple entendre”, ce qui dans la langue d’Elvis, signifie “jeu de mots à trois sens”. Au premier degré, une mode venue de l’underground électro qui, de MSTKRFT à SBTRKT, s’amuse à supprimer les voyelles, genre “t’as vu mon blaze comme il est classe ?”. Sauf que, là, on vire un N, on garde un A, c’est un peu boiteux et MDNN aurait été foireux de toute façon. (Kylie Minogue est aussi une copieuse : pour ses 25 ans de carrière, le projet s’appelle K25.) Flickr et Tumblr sont sur la même ligne, c’est du branding 2.0. Mine de rien, la doyenne a encore du flair. Ou de bons conseillers.

Au deuxième degré, un simple changement d’initiale qui ne trompe personne : Madonna = gay fanbase = clubbing = drogue pour danser jusqu’au petit matin. Cliché et ringard, ce raisonnement s’appuie sur une histoire longue de trente ans entre la noctambule du New York post-punk et la communauté homo qui le lui a toujours bien rendu. En 2005, sur Confessions On A Dance Floor, c’est par une approche disco, queer et fun, ambiance Abba et boule à facettes, qu’elle avait appâté du pédé. Aujourd’hui, c’est un peu dommage que ce lien, bâti sur des prises de positions honorables d’un côté et la fidélité de l’autre, soit réduit à cet (ego) trip facile. Mais elle affirme aussi en ce sens que la came, c’est elle. Et Madonna, c’est de la bonne.

Au troisième degré, le “Madonna DNA” (ADN en anglais), et c’est là que ça devient intéressant… A peu de choses près, chaque chanson de MDNA sonne comme le remix d’un morceau existant. Là où la plupart des critiques cherchent le marquage à la culotte de Lady Gaga, Madonna s’est contentée de resservir sa bonne vieille soupe. L’album manque peut-être de surprises, il est conçu comme un best-of où chaque auditeur retrouve son hit préféré, remis au goût du jour. Le premier single Give Me All Your Luvin’ est une version accélérée de Like A Virgin ; I’m Addicted est un reboot après chirurgie esthétique de Rescue Me ; I’m A Sinner fait un mash-up de Human Nature avec Ray Of Light ; I Don’t Give A peaufine le brouillon qu’était American Life ; l’intro de Girl Gone Wild, premier titre de MDNA, reprend exactement Act Of Contrition, l’outro de l’album Like A Prayer, alors que les couplets pompent allègrement Hung Up… Au lieu de courir après les jeunettes qui lui doivent tout, elle s’auto-cite (elle l’a toujours fait) : on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même.

Certains clins d’œil sont subliminaux : seule Gang Bang semble sortir réellement du lot. Ce morceau épique affiche une agressivité meurtrière jusque là quasiment absente des textes de Madonna, si l’on exclut le prurit R&B Revolver (au refrain inoubliablement poétique “My sex is a killer, do you wanna die happy ?”) et le bonus track Beautiful Killer, étrange hommage à Alain Delon dont elle s’imagine la victime consentante, flingue dans la bouche pour qu’elle se taise. Mais on retrouve tout de même sur Gang Bang des réminiscences du travail de Mirwais, des sonorités datées qui ont fait la triste renommée de l’album Erotica et le beat “techno de backroom” entendu sur les milliards de remixes produits depuis 20 ans. Autrefois, elle chantait les amours déçues et les amants indécis ; aujourd’hui, elle pourchasse son ex en enfer pour le buter une deuxième fois. On est loin de la plénitude zen affichée à l’époque Ray Of Light, de l’introspection mystique période American Life et de l’hédonisme fédérateur qui parcourt son œuvre depuis Everybody, son tout premier single. Ce traitement sombre et trash du thème de la rupture révèle une psychologie de pétasse vengeresse, en décalage avec la sagesse dont elle se pare sur d’autres titres.

Pied de nez au poncif de la presse musicale qui attend toujours “l’album de la maturité” de la part d’un(e) artiste confirmé(e), MDNA est un disque de crise d’adolescence. Rien d’étonnant étant donné l’âge de moins en moins assumé de la chanteuse. Elle affirme crânement qu’elle est ceci (une fille qui se lâche sur Girl Gone Wild), cela (autocritique jusqu’à l’excès sur I Fucked Up), ou tout simplement la reine, d’après le rap de Nicki Minaj sur le final grandiloquent de I Don’t Give A. Oubliées la politique et les valeurs morales. Tombé le masque de confiseuse qui avait farci ses loukoums de sous-entendus mielleux sur l’album Hard Candy. En 2012, Madonna veut entendre le nom de son amoureux pour la montée que ça lui provoque, peu importe ce que lui ressent pour elle. Elle n’invite plus les gens à danser avec elle. Elle ne veut pas s’expliquer, comme elle le clame sur Turn Up The Radio.  Elle veut seulement prendre le volant, se tirer très vite et très loin en écoutant de la merde très fort. En voiture Ciccone !

Elle ne sera pas toute seule, j’ai pris la place du mort (par overdose).

“Guilty pleasure”. That’s how you put it in English.

I’m basically coming out as a Madonna fan today. Playpause never quite made room for the Queen of Pop, except here and there. I like to present myself as a serious music listener. Serious in the sense that I keep my ears wide open, that I can talk for hours about pop or soul or jazz or disco history and that I don’t indulge in Top 40 hits.

You wish.

Time has come for a proper critique of MDNA. I already read a lot about the record, but didn’t find the spot-on review. Every writer, every blogger seems to be investigating the Madonna case as if she was already dead and buried under the mounts of Lady Gaga. But, hey, hasn’t Madonna been there for 30 years when la Gaga is already struggling to keep relevant? Madonna has nothing to prove : after Michael Jackson’s and Whitney Houston’s passing, she is the only artist from the 80s that the world still cares about. I mean, the girl has been doing the same job since 1982 (not counting her training years as a dancer or background singer), she never got fired and, even when she flopped or disappointed, people were still raving about her. She’s Queen Elizabeth II, Steven Spielberg and Coca-Cola at the same time.

So, what’s to expect from MDNA? Just another Madonna record, actually. I don’t subscribe to the point of view that Madonna is a groundbreaker. She probably never really was one for real. Musically speaking, she’s not a trensetter but a trendsurfer. She’s a smart chick, she has flair, she’s greedy and a dominatrix. She’ll do what it takes to make a scene and buzz the headlines. She’s picked Nile Rodgers to compete with Diana Ross, Debbie Harry and David Bowie, who were confirmed pop acts. She’s hired Lenny Kravitz when Lenny Kravitz was writing lusciously good songs. She’s sucked up Björk’s work when Björk was still a London clubkid. She’s prostituted Mirwais to show that music can make the bourgeoisie (her) and the rebels (him) come together. She’s sampled Abba to hammer the fact that she’s been updating the disco genre for 30 years. She’s hastily teamed up with Pharrell Williams, Timbaland and Justin Timberlake to set herself free from her (former) record company and still managed to put the biggest tour ever for a solo artist out of a bleh album.

In 2012, she’s using the same old recipes. But she’s nipped and tucked them in order to make them sound anew, just like she’s been doing plastic surgery quite gradually for the last 10 years in order to look ageless. But, she’s not fooling anyone and, as she sings on MDNA, she doesn’t give a fuck. Madonna is Benjamin Button, Madonna is the daughter of her own daughter Lourdes. MDNA is the slicker, more condensed version of everything you like about Madonna. MDNA is genetically modified Madonna (the first album). MDNA is the answer to the question Who’s That Girl ?. MDNA is Like A Prayer faithless. MDNA is radio-friendly Erotica. MDNA is Ray Of Light at the club. MDNA is auto-absolved Confessions On A Dance Floor.

Full of self-references, the album sounds like a remix of her past hits. Give Me All Your Luvin’ is Like a Virgin ; Girl Gone Wild tells the same story as Burning Up ; the probable next single Turn Up The Radio enhances Holiday and Where’s The Party with more volume and sound compression ; I’m Addicted redoes Borderline and Rescue Me in a cruder, self-conscious way ; I’m A Sinner mashes Human Nature up with Ray Of Light. Et cætera. Nothing too surprising, everything so familiar.

She has left off the political statements and she pretends to be sorry for the pain she’s caused. But at the same time, she pictures herself as a witch descending to hell to kill her ex twice just because she feels it would be fun. Lyrical consistency was never her thing (neither grammar, by the way). 20 years ago, she needed to “justify her love” but now the talking is over. She just needs to dance, on her own. Her divorce with Guy Ritchie is obviously one of the themes of the record, but she doesn’t even try to make it sound authentic. She just fuels her pop songs with stories that people think they need to hear from her. On Gang Bang, she takes an unapologetic and immature revenge whereas, on I Fucked Up and Best Friend, she longs for the lost love. Tell me about steadiness.

So MDNA is a record about teenage crisis, the ultimate ego trip. It’s about coming out as she is: a megalomaniac persona who enjoys dancing wildly, bitching about everybody else and pretendig to be a lady at heart. Whereas the first album and American Life remain my favorites, MDNA is already the soundtrack of the months to come. Time has passed since Lou Reed sang about waiting for his man to provide the dope. Madonna IS the drug, she doesn’t need anyone or anything to get high on herself. Me neither.

Lady Madonna, children at your feet,
Wonder how you manage to make ends meet.

Can’t we break all the rules for a while

If someday we all go to prison for downloading music, I just hope they'll split us by the music genre.
2012 a bien commencé, enfin, pas pour tout le monde. Kim Dotcom (rien que pour ce pseudo ridicule, foutez-le en prison) pensait sans doute que ce serait l’année de son accession au titre de Steve Jobs 2.0, mais le FBI a préféré le crucifier avant même qu’il essaie. Enorme coup de communication de la part de cette institution qui aurait pu se contenter d’un mandat d’arrêt, d’une inculpation pour trois cents millions de motifs criminels et faits délictueux, mais non, il a fallu frapper encore plus fort, jeter le mec en tôle et saisir ses biens comme si c’était le boss d’un cartel colombien. Beaucoup l’ont dit et j’y souscris : Megaupload était indéfendable, même si tout le monde y a trempé sa souris un jour ou l’autre. Mais comme l’a fait remarquer @simoneduchemole : « Les américains, pour fermer Megaupload ils sont très forts, mais pour fermer Guantánamo il n’y a plus personne« .
Deux poids, deux mesures.
Quels intérêts si importants ont exigé le déploiement de tels moyens policiers autour du monde ? L’industrie de la musique, du cinéma, de la télévision, de la presse et de l’édition même (oui, oui, on peut même télécharger le pdf de « Internet pour les Nuls » illégalement) sont en crise, le raccourci facile est d’accuser le développement des cyberlockers que ni Hadopi ni l’IFPI n’ont le droit de surveiller ou de contrôler. Naguère, c’était les échanges de torrents et le peer-to-peer. Avant, c’était les graveurs de CD. Encore avant, les magnétoscopes, les magnétophones, les bootleggers qui reproduisaient des vinyles pirates, les faussaires qui contrefaisaient Van Gogh ou Monet. Si l’on remonte le cours de l’histoire de l’art, on trouvera toujours une bande de petits malins qui se sont affranchis des contraintes technologiques, légales, voire morales, au nom de la diffusion de contenus culturels, souvent intéressée. Sans parler des simples voleurs, qui n’ont besoin que d’un peu de doigté et d’audace pour acquérir sans frais le dernier Mylène Farmer ou « Tire-m’en deux, c’est pour offrir » de San Antonio.
Contenus ou produits ? C’est bien là le cœur de la question : contrairement au vin, au pain et au Boursin, les contenus n’ont de la valeur qu’aux yeux de ceux que ça intéresse. Les produits, en revanche, ont de la valeur pour ceux qui les produisent. On n’est pas prêt à mettre la même somme selon que l’on cherche une musique pour emballer les gonzesses ou que l’on gère les stocks pour faire monter les prix. La digitalisation devait mettre un terme à cette pénurie organisée, et on y était presque arrivé : Internet, notamment grâce à une myriade de blogs patiemment nourris et entretenus, était bel et bien devenu la banque mondiale de la création, une archive en expansion permanente où presque tout était accessible moyennant un abonnement à un FAI.
D’où l’indignation générale, bien légitime : ceux qui paient (parfois cher comme aux USA) pour avoir accès à ce cybermarché ne comprennent pas pourquoi il faut payer en plus pour consulter le contenu, voire le sauvegarder sur disque dur. Comme si on payait un droit d’entrée à la porte de Carrefour avant de passer à la caisse pour un baril de lessive : la double peine. D’où l’embarras des politiques qui ne savent pas comment légaliser ce transfert d’argent (avant on payait le disque, maintenant on paie la bande passante, autrement dit le droit de passage, au portier). D’où la panique dans les grands groupes audiovisuels qui n’ont pas compris (ou qui font semblant de ne pas avoir compris) qu’il est indécent de facturer (presque) aussi cher un fichier que le support physique (déjà une arnaque en soi, mais c’est une autre histoire) ou que l’expérience poétique d’une séance de cinéma. D’où l’hypocrisie des agences de pub qui se gavent sur la promotion de ces produits culturels mais aussi sur la concurrence entre fournisseurs d’accès et services en ligne. D’où la gêne de la presse spécialisée qui vit notamment des dites campagnes, alors que les journalistes téléchargent à tout va « à des fins documentaires ». D’où la fracture numérique entre la génération des digital natives et celle des consommateurs de bien matériels : le retour en arrière semble impossible, mais ce sont, pour l’instant, toujours les anciens qui dictent leur loi sur ce nouveau continent. Internet devait nous faire gagner du temps et de l’argent. En fait, ça nous prend tout notre temps et c’est un prétexte pour nous prendre aussi plus d’argent.
Kim Dotcom avait un autre plan en tête, qui menaçait de renverser le modèle vacillant. Pour peu que l’on se soit intéressé aux différentes formules d’abonnement à Megaupload ces derniers mois, le lancement de Megabox était imminent. Ce n’était pas un plan machiavélique et secret, simplement un énorme coup de pied sur le point d’être mis dans les couilles de la fourmillière (voir le clip de promo avec Kanye West et Kim Kardashian, un teaser WTF). Un raccourci entre créateurs et internautes faisant fi d’iTunes, de Spotify ou de tous ces abonnements premium qui (à mon avis) ne servent pas à grand chose (à part faire des profils d’utilisateurs, découper en tranches les modes de consommation et inciter à rester pas loin d’un écran qui affiche des bannières). Je ne dis pas non plus que cela aurait été la solution à tout, mais au moins une tentative de mettre en ordre les usages sans spolier ceux qui travaillent ou créent. Ajoutez une petite taxe sur les revenus générés par ce service, et tout le monde aurait pu y trouver son compte.
Mais la crainte de voir les positions dominantes des industries cuturelles remises en cause a été trop forte, et les agissements fort peu honorables de Kim Dotcom et ses potes auront été l’excuse toute trouvée pour les faire tomber, sous les ricanements des Anonymous les plus implacables. N’est pas Julian Assange qui veut. D’autres sites vont prospérer sur les cendres de MU, sans que cela ne fasse avancer le débat d’un pouce : pas plus tard que le week-end dernier, à l’occasion d’un anniversaire en famille, les bons plans s’échangeaient entre jeunes et moins jeunes, la grand-tante affirmant que « si je peux pas suivre la fin de la saison de The Good Wife, je sais pas ce que je vais devenir ».
Tandis que l’on voit s’étioler, du moins pour un temps, l’eldorado des contenus, quelles perspectives avons-nous ? La licence globale, une idée séduisante, est au fond inapplicable. Il faudrait déployer des moyens considérables de traçage des contenus, et résoudre tout un tas de questions philosophiques pour faire en sorte qu’elle soit moins invasive sur le plan de la vie privée qu’Hadopi et plus juste que la répartition SACEM. Les modèles émergents (streaming, abonnements, catch up, VOD…) ne règlent aucunement la question du piratage.
De la créativité et l’envie de rompre avec les schémas construits depuis un siècle sont nécessaires pour embrasser la dématérialisation des contenus « in a material world » : comme le chante China Moses, comme l’a chanté sa mère avant elle, can’t we break all the rules for a while? 

Probably PlayPause’s most extensive post, that develops my points of view regarding Megaupload and the Kim Dotcom case. But, long story short, here’s what I mean: music was never materialized to begin with. Prehistoric musicians never thought they could make a living out of their art, they probably never wanted to. Most post-cyber revolution artists won’t get rich either with their creation, but they’ll buy houses and pay for their childrens education with daytime jobs, endorsement deals and modelling contracts. Not that I find it exciting, life would be more fun and the world a better place if we could all just paint and dance all day long. Anyway, cultural industrialism has almost nothing to do with the primary purpose of artistic creation and performance.
Enough said. I’d rather introduce China Moses‘s song, Bad For Me, from which the title of this post is taken. The track written in 1979 for her mother, Dee Dee Bridgewater, was originally a charleston/disco album opener made famous by the Larry Levan 12″ mix (available on YouTube, but absurdly muted). It was turned into a lush and infectious groove reminiscent of Diana Ross’s Love Hangover, in 1996. I love this version and had to search my CD collection to hear it again.
And it helps soften my very serious and radical statement: as long as soul singers can make uplifting tunes about bad romances, I’ll be fine with this industry’s greed.
Almost.

China feat. Dee Dee Bridgewater – Bad For Me

Si tu changes une lettre à Dotcom,
ça fait Dotcon.

Comme un boomerang dans ta face

"Le garçon qui a le don d'invisibilité"
C’est décidé, il faut que j’intervienne. Bullshit police à l’attaque ! Je viens à l’instant de recevoir la newsletter de Mercury pour la promo de From Gainsbourg to Lulu, hommage du lardon au daron (on est loin de l’album dit « de la maturité »), qui commence par « On avait quitté Lulu, fils et dernier enfant de Serge en 1988, à 2 ans, lorsqu’il avait rejoint son père sur la scène du Zénith de Paris…« . Hé bien non, les gars, désolé, vous nous prenez une fois de plus pour des truffes.
Si ce disque est bel et bien le premier album du dernier rejeton du grand Serge, le « p’tit Lulu » a commencé sa carrière discographique en 2001, lorsqu’on célébrait les dix ans de la mort de Gainsbourg. Alors adolescent, il avait sorti un duo enregistré avec sa mère Bambou, une reprise (déjà) de Ne dis rien, créé en 1967 par Anna Karina et Jean-Claude Brialy.
Ça lui avait valu un peu de presse, ses premières séances photos, tandis que la douairière de Gainsbarre squattait les plateaux télé pour dire du bien du défunt et faire écran devant le fiston. Trop timide, trop embarrassé par la légende parternelle, trop à l’étranger (il étudiait la musique aux USA, si je me souviens bien)… C’était touchant, œdipien et vaguement sulfureux, mais oubliable. D’ailleurs, tout le monde a oublié.
Ce n’est pas la première fois que la promo autour des célébrations gainsbourgeoises s’empêtre dans une réécriture ignare et foireuse de l’histoire : début 2011, au moment de la réédition d’une intégrale de plus en plus intégrale, on nous avait fait croire à un inédit inouï, Comme un boomerang, chanson écrite en 1975 pour la participation de Dani à l’Eurovision, rendue célèbre en 2001 (anniversaire toujours) grâce au duo enregistré avec Etienne Daho. Sauf que le titre se trouvait déjà sur le CD bonus de l’intégrale paru en 2001 (sur lequel on trouvait aussi La noyée, qui sera repris quelques années plus tard par Carla qui n’était alors que Bruni, à grand renfort d’annonces trompeuses, pompeuses et pompières)…
Tout ça pour faire la promo d’un énième disque modasse de reprises mouligasses, sur lequel le fils à papa réussit l’exploit de chanter avec moins de coffre que Jane, Charlotte et Bambou réunies (et pourtant, je les aime, surtout la première), avec un tracklist qui néglige les presque 500 chansons pour retenir les sempiternels « jolis » tubes sur des arrangements tartignoles, et qui se fourvoie dans le people le plus neuneu (Scarlett Johansson, Ayo, Mélanie Thierry, sans parler du duo Vanessa Paradis / Johnny Depp sur la Ballade de Melody Nelson).
Justement, pour rouvrir le dossier Melody, on continue en anglais…

Dead Man 1 vs. Dead Man 2, who’s the toughest, who’s the bravest, who’s the most scandalous, who’s the one you’d rather revive? Funny how two posthumous projects involving chanson française legends have come out the same week. Or maybe it’s not funny, it’s just business: Serge Gainsbourg died 20 years ago, so the marketing has been intense.
On the left, we have the deluxe reissue of L’histoire de Melody Nelson, which has already been deluxe-reissued a couple of times. Whatever, this year, it comes with a great bonus: the Melody Nelson sessions. Alternate takes, instrumental versions (on En Melody, the unedited electric violin solo by Jean-Luc Ponty is quite something), rejected lyrics, even a unreleased track, Melody lit Babar. (This song is actually not 100% new to aficionados, since an instrumental adaptation for a Martini commercial was already featured on the bonus CD from the 2001 « complete works » boxset.) It is great to hear this masterpiece in the making, with Serge Gainsbourg’s instructions to the studio engineer for example. And it reminds of how brilliant this album was, back in 1971.
On the right, we have L’homme à tête de chou covered by Alain Bashung, after the 1976 Serge Gainsbourg concept album. Originally recorded as Jean-Claude Gallotta’s ballet soundtrack. I guess it was at first used during the rehearsals, as Bashung was supposed to perform his vocal parts on stage. But his solo works and his health condition prevented him from doing so, before his passing away in 2009. The show was a great success and its music caused much discussion, acclaim and wonder. Universal, record company and publisher for both artists, couldn’t miss the opportunity of milking these two defunct superstars, so the 2006 tapes have finally found their way to digital and CD retailers for the macabre celebration.
Last year, I saw the show and was enthralled by the dance rendition of this noirish love story / crime of passion. Not being a fan of Bashung, I turned out to be also quite seduced by the adaptation: though very faithful to the original, it sounds sometimes like an imitation, sometimes like a softer, muffled version of Gainsbourg’s « cabbage-headed man ». Now that the album has been officially released and that the memory of the performance has started to vanish, I perceive that some records by Gainsbourg are not intended for anyone else. L’homme à tête de chou is one of them, despite the overwhelming promotion and the beautiful Variations sur Marilou video. Who knows if Gainsbourg would have enjoyed the contemporary jazz fusion textures and light electronic interventions?
In 1982, they had collaborated on Bashung’s Play Blessures,
which helped the rocker’s popularity. But the album hasn’t aged well
and isn’t, to my ears, a proof of their artistic propiquinty. They had in common an iconic status, a poetry of their own, booze and chicks, nevertheless, their
music never touched the same audiences. Gainsbourg made it to the top list of
international pop wizards and influencers, Bashung « only » saved French rock. Good for him, but not good enough.
Dead Man 1 wins!

Serge Gainsbourg – L’amour à la papa

Et là-bas, écris-moi, dis-moi, dis-moi
Si on fait l’amour à la papa


Serge Gainsbourg

(picture taken from All Pictures Media)

Video killed the video stars

gaga.jpg Embouteillages sur la timeline : à force de vouloir créer l’événement toutes les semaines, Lady Gaga commence à se prendre les pieds dans le tapis de l’immanence.
Promue comme une artiste complète, à mi-chemin entre la sueur musicienne (ce qui est largement exagéré : même si ses aptitudes sont indéniables, la multiplicité de ses collaborateurs laisse planer le doute sur son véritable apport en termes de création musicale) et la performeuse démultipliée-décorporée, l’intense exposition à laquelle on la livre pour créer le buzz à quelques jours de la sortie de son album prend le risque de l’incohérence plurimédia. Cela va au-delà même d’une stratégie pas si ancienne, le blitzkrieg médiatique. Alors qu’avant, les majors bombardaient chaque titre, et l’attirail visuel associé, par cycles et jusqu’à plus soif, les singles se succèdent aujourd’hui à vitesse grand V, sans doute pour contrer les menaces de leak permanentes, suivis de loin par des clips de plus en plus ambitieux, boursouflés, déconnectés de tout enjeu musical. La vidéo de Judas est à peine sortie sur Youtube qu’on balance à la radio The Edge of Glory, single non-officiel, avant d’annoncer le streaming promotionnel de Hair… Sans parler du (attention, concept à tiroirs) « jeu social capsule » GagaVille, qui maintient les internautes en haleine avant la sortie officielle de Born This Way le 23 mai.
Pareil pour Beyoncé, qui révèle dans le chaos la sortie de son 4e album, alors que la mise en ligne du single Run The World (Girls), à l’origine intitulé Girls (Who Run The World) et curieusement rebaptisé à la hâte, a été avancée pour mieux faire un four, et que le clip est repoussé de jour en jour pour exorciser le flop, pendant qu’elle mène campagne aux côtés de Michelle Obama contre l’obésité dans les écoles américaines, au son d’un tube revisité, Move Your Body, d’après Get Me Bodied (2007). Et j’imagine qu’on s’est réjoui dans le camp B, il y a 2 mois, que la toile s’enflamme pour le mash-up Radiohead / Single Ladies, collision ultime entre le lancement surprise d’un album qui ne s’est finalement classé n°1 nulle part (non plus) et un autre succès post-féministe de l’enfant de la destinée devenu manifeste polysexuel et hédoniste de la génération Glee.
Le référencement pour une vedette de la chanson, c’est comme l’e-reputation pour un CV 2.0 : l’abondance est une preuve de vie. Pour cacher les pages vous montrant en mauvaise posture, noyez-les dans des profils de compte à moitié vides ; pour éviter que les liens mediafire ne remontent en première page de Google, faites en sorte que les blogs et sites d’entertainment publient des billets sur vous toutes les heures. Lorsque des teasers préprogrammés de Gaga ont été tweetés au même moment que l’annonce de la mort de Ben Laden, on a senti comme un flottement, un malaise même chez les fans les moins regardants.
On ne sait donc plus si on aime les popstars pour leur contribution créative ou pour leur capacité à rester en tête des Trending Topics, ni si on mesure leur bankabilitude en cumul de ventes ou en nombre de clics. Le partage de liens, d’onglets Facebook et de sites événementiels occupe plus d’espace que la lecture critique… On se dit toujours qu’on reviendra sur le fond plus tard, mais, en attendant, retweetons sur le champ et sans distinction un hommage chorégraphique inspiré, une galerie LOLtoshop de l’artwork, les larmes du fanclub, et autres reprises mignonnes et/ou minables pour ne pas être à la traîne.
Faites du bruit, elle est née pour ça.

Overwhelming and unavoidable, Lady Gaga has brought something new on the pop scene and the music business since her big breakout.
Musically, I’m still not sure of her real input: she has too many collaborators, drowns her songwriting in multi-layered references and claims her inspirations too often to be honest. David Bowie can certainly be considered as an influent musician, but what about Madonna and Whitney Houston? Show business flair has never been an aesthetic proposition, nevertheless it can be considered as a marketing hook: « Follow me, I’ll bring memories back to you », she means when she turns Express Yourself into Born This Way or when The Edge Of Glory quotes the corniest reminiscence of the Eighties, i. e. Clarence Clemons’s saxophone. I’m pretty sure no kid born after 1995 has ever heard of this guy, but he has been a viral star from the day Lady Gaga posted a picture of him in the studio. Or was it the other way round? Have Bruce Springsteen’s fans suddenly swapped musical tastes and do they see Gaga as a new rock icon?
What bothers me about this chick is that she goes way over the edge, or at least pretends to do so, and still no one, so far, has formally charged her for being what she is: a parody. Yet, here she is, muppet-showed, meat-dressed, egg-borne, motorcycled, lace-masked, halo-wigged, pointy cheeked and nailed, deformed, even glammed up, never looking real, never looking great, always looking like a special effect. Madonna reinvented herself in
various feminine figures, Whitney Houston sung all kinds of african-american-infused music, Britney Spears gave birth to her grown up self in front of all the cameras of the world, but Lady Gaga has nothing to tell about her, she just is the disposable and commutable living piece of art. Traditional pop stars from the MTV generation worked in eras and cycles, Lady Gaga outpasses this vision by cross-dressing, crossing releases and adressing her imperious status. This makes her probably her greatest threat: she will be out of the game the day a younger version of herself comes out and starts being a better, updated version of Gaga. What will she become when she’s not allowed to spend $10M on a video? What happens the day she realizes she doesn’t want to be Michael Jackson’s zombie reincarnation?
In the meantime, other pop stars try and mark their spot in the 21st century. Regular pop singer Adele keeps on breaking sales and charting records, yet she almost wears the same dress on every tv show and has released one hit single from her album. Rihanna goes the easy way, between obviously produced hits and a few cameos in commercials. She almost had a video incident with the David LaChapelle plagiarism accusation, but created diversion with her frenemy Britney Spears, candidly resourceful.
Beth Ditto is another one. Huge talent, plump girl with a real physique, probably too young for her fame too.
Life-smart and funny, where Gaga is mass-manipulative and sardonic, this Gossip girl hasn’t showed the best of her yet. She still has to make THE crossover to become as big as she deserves to be. The main difference between her and Gaga is that she doesn’t play odd, she IS always kind of incongruous, but with such modesty, aplomb and joie de vivre, unlike the deranging deranged game of Gaga.
The hommage she pays to Madonna in the I Wrote The Book video, made with taste, wit and a regular budget, shows that good popstars are those who have a good balance between flashbacks and flashforwards. Unpretentious, infectious and above all well done. Just like this version of Dusty Springfield’s Born This Way, produced in 1990 by PWL, a then-fashionable British dance duo. Yes, dance music doesn’t always have to be about getting on the floor, shaking booties and making out in the toilets. But what Gaga doesn’t seem to be aware of is that we were born before her, and that we ain’t waiting for songstresses to teach us the meaning of life and stardom anymore. Long ago, Sly & the Family Stone already promised us that Everybody Is A Star, and it happened through reality TV. Yuck. So I’ll stick to Dusty’s unapologetic and atheist vision of the « complexities of life ».
‘Cause had God made no mistakes, he’d had found a way to shut Mother Monster up.

Dusty Springfield – Born This Way (extended 12″ remix)

 

Pas gaga de Gaga,
et toi ?

Triste tropisme

Play Pause repart, revient, rerepart, rerevient, c’est un éternel recommencement. Ça doit bien être la dixième fois que je me remets à ce blog, en clamant haut et fort (« effort… effort » répondit l’écho) que j’y crois à fond. Autant d’annonces pour si peu d’effets, on dirait un projet du gouvernement…

Tiens, parlons-en, du gouvernement. Leur nouveau truc, c’est l’identité nationale. Enfin, c’est pas très nouveau, ça date de 2007 quand même, mais, c’est comme l’histoire de Frédéric Mitterrand, c’est sans doute parce qu’ils s’emmerdent qu’ils le ressortent maintenant. Un petit peu aussi parce qu’ils ne savent pas trop quoi raconter à quelques mois de régionales et qu’il est plus « porteur » de parler de la Frâââânce et de ses valeurs que de la suppression de la taxe professionnelle et des impôts locaux qu’il va falloir augmenter pour compenser. Sûrement aussi pour faire diversion, pour faire oublier les charters d’Afghans, la catastrophe Jean Sarkozy, la honte Hortefeux, le procès Clearstream qui fait « pschitt », le vain G20

Alors Besson, ministre des basses tâches, ouvre un site Web, s’affiche dans tous les médias possibles pour dire avec son air de faux derche « Mais c’est une grande question, c’est même la seule qu’il soit digne de poser ». Et Ségolène, pas rancunière, de lui emboîter le pas « Oui, oui, oui, d’ailleurs, j’étais la première à en parler » (sic). Elle prétend même que c’est en 1986 (et re-sic) qu’elle a lancé le sujet. Pfiou… 23 ans pour qu’une question posée revienne au cœur du débat politique, plus fort qu’Hubert Reeves et Al Gore réunis !
Bref. Revenons au fond du sujet.

Qu’est-ce qu’être français ?

Anne Roumanoff, que je ne considère pas comme la comique la plus drôle ni la plus inspirée, s’est fendue d’une chronique fort bien troussée et qui remet Besson bien à sa place dans le JDD du week-end dernier. En résumé, être français pour la petite dame en rouge, c’est avoir des grands parents étrangers, pleurer à la Coupe du Monde et s’identifier autant à Astérix qu’à Obélix. Courageux mais fleur bleue, contestaire mais loyaliste, droit dans ses bottes mais sur les barricades.
Pourquoi pas.

On va donc enfoncer les portes ouvertes, invoquer les Lumières, le Maréchal et le Général (en prétendant regarder dans la bonne direction), flirter avec le patriotisme moisi à l’heure de l’Europe déjà construite. Contributions en ligne, forums participatifs, réunions de groupe, comme si le pays tout entier était inscrit aux « Français Anonymes » en rehab.

Tout ça pour quoi ? De nouvelles lois, un nouveau design pour la carte d’identité, un beau rapport que personne ne lira ? On ne sait pas… Beaucoup de bruit pour rien, sans doute.

Ce qui est sûr, de mon point de vue, c’est que l’identité nationale aura fait un grand pas le jour où on ne dira plus de Rachida Brakni que c’est une actrice française d’origine algérienne comme si c’était une circontance atténuante ni d’un délinquant qu’il est d’origine maghrébine comme si c’était une circonstance aggravante, où on ne suggérera plus à Rama Yade de se présenter dans l’Essonne parce qu’elle y fait plus couleur locale que dans les Hauts-de-Seine, où les gouvernements ne se demanderont plus comment intégrer les jeunes des cités dans la société mais « comment a-t-on fait pour accorder autant de poids aux vieux schnocks des beaux quartiers ? ».

Parce que la communauté des blancs bien pensants qui lisent Le Figaro et Télérama n’est qu’une des communautés qui réfléchit, consomme et agit en France. C’est « une certaine idée de la France », mais pas la France entière.

Si j’étais Frédéric Lefebvre, je posterais en illustration de ce billet la chanson « Douce France ». Peut-être même la version de Carte de Séjour (1986) pour faire plus branché.
1986, tiens donc, ce ne serait pas Ségolène qui aurait soufflé l’idée à Rachid Taha ?

L’identité nationale, c’est comme la branchitude : c’est à partir du moment où tu la décrètes que ça sent le coup monté.

To illustrate the first part of this lampoon, I originally wanted to post Do You Speak French by Nite School, but since this track is widely available on various blogs, I’ve dug into my music collection in order to find a relevant song about France… Many possibilities, among which:

But I’ve decided to follow the campy and slightly grotesque road of Spanish duet Baccara, who recorded « Parlez-vous français ? ». This masterpiece reached #7 at the 1978 Eurovision contest. The French lyrics use as many clichés as possible, like l’amour, french kissing and rough men taking girls to Paris.

That quite sums up my thoughts regarding the present political debate in France, on « national identity ».
Yes, France can be seen as a European country stuck between Spain and Luxembourg, which identity lies in the way its inhabitants enjoy seduction, making out and having sex. Honni soit qui mal y pense

Baccara – Parlez-vous français ?

Comment veux-tu que la France soit un grand pays avec un tout petit président ?

(Image by Riss from Charlie Hebdo)

In case you’ve missed it (résumé des épisodes précédents)


C’était l’anniversaire de ma sœur, hier. C’était la Digital Detox Week, la semaine dernière. C’était aussi la journée de la Terre. Et la journée des magasins de disques. La semaine du développement durable a commencé le 1er avril (il est toujours temps de sauver Willy). Club Med s’engage, un jour nous aurons droit à la journée officielle du bonheur… Ça tombe bien j’ai loupé la journée de l’orgasme global pour la paix, je savais pas. De toute façon, c’est acquis, il y aura encore la fashion week, la saison prochaine, et il y aura la semaine de la critique à Cannes, cette année encore. Parce que 2009 est l’année mondiale de l’astronomie. L’année des fibres naturelles, de la réconciliation, du gorille, de Gogol, de José María Morelos y Pavón au Mexique, de la jeunesse en Russie… Commémorons, un jour, une semaine, une quinzaine, un mois, une décennie, ce qui compte, c’est qu’il y ait une date. 1967, année internationale du tourisme. 1975, ma naissance et l’année internationale de la femme. Et le 21 mai, mon anniversaire, tombe cette année la journée mondiale de la diversité culturelle pour le dialogue et le développement. Trouvé il y a trois jours, un 45 tours de Radioactivity datant de 1976. Presque aussi vieux que moi, tiens. Mais je me dis que si Mirwais sample The Man Machine, un autre titre de Kraftwerk, sur Man pour Yas, c’est qu’avoir plus de trente ans ne rend pas forcément obsolète. Le temps s’accélère, les événements d’hier sont de l’histoire ancienne.
Je me demande même s’ils archivent quoi que ce soit ou s’ils font des sauvegardes, chez Twitter. Nous sommes victimes de schizophrénie temporelle, chronique au sens étymologique, partagés entre devoirs de mémoire, veille de fêtes, updates, jours d’après, lendemains qui chantent ou déchantent, c’est selon… et fins de mois difficilles. Et le lundi de pentecôte, alors, c’est férié ou pas ?

Donc, au cas où tu l’aurais ratée, je remets en ligne ma dernière select en date. Une vieiile série de compilations maison ravivée en 2009. Radiolala devrait revenir aussi…

In case you’ve missed it, 2009 is the year of astronomy, of natural fibres, of the gorilla, of human rights learning, of reconciliation…
In case you’ve missed it, people from the global orgasm for peace organization wanted you to climax at the same moment, on the solstice last december, and they said they would do it again.
In case you’ve missed it, Digital Detox Week was last week. Record Store Day two weeks ago.
In case you’ve missed it, Björk‘s next live CD has leaked online, whereas the release has been postponed. Funny how these two events occurred on the same day.
In case you’ve missed it, Edie Britt died of an electric shock after being strangled and crashing her car into a light pole, and the police had nothing to say about it.
In case you’ve missed it, Susan Boyle. Pretty sure it’s a PR stunt to make the good people of the UK proud of themselves in times of recession, to have every misérable soul sing I dreamed a dream and forget to burn Sir Fred Goodwin’s house down. Expect Babe the gallant pig goes to Mexico (the sequel) in order to make everybody feel better after freaking out about swine flu.
In case you’ve missed it, I’m one year older in less than a month.

In case you’ve missed, spring hasn’t really blossomed yet. At least, not where I live. So you can still listen to WINTER SELECT ’09.


WINTER SELECT 09

1. Ringa Ringa / A.R. Rahman feat. Alka Yagnik & Ila Arun
2. Indian Fever / David Starfire
3. El Bimbo (Disco version) / Bimbo Jet
4. Koupes – I’ll smash glasses / Shantel
5. Tu Café / N.O.H.A.
6. Misterio Stereo / Curumin
7. Deeper Waters (Eva Be’s Secret Lover Remix) / Recloose feat. Joe Dukie
8. Turn Your Lights On / Emanative feat. Ahu
9. Miles Away / Linkwood Family
10. Keep On (Daniel Wang & Brennan Green’s Vas Deferens Mix) / Crazy Penis
11. Williams’ Blood (Yam Who Cosmic Jam) / Grace Jones
12. A Roller Skating Jam Named Saturdays (Dave’s Home Mix) / De La Soul
13. Guinea Pig (Vocal Variation Mix feat Julia Biel) / Ben Watt
14. Thank You (skwerl’s ungrateful love mix) / The Dining Rooms

Tu crois qu’elle a demandé à son chirurgien
qu’il lui fasse une tête de mémère, la Carla ?

(Top image from Digital Detox Day campaign by Baseman)